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Porsche 917
Sur la fabuleuse Porsche 917, les tubes de châssis sont soudés de manière à communiquer entre eux et pas l'intermédiaire d'une valve, en "gonflant" en quelque sorte le châssis, il suffit alors de contrôler la pression pour en détecter une éventuelle fissure, ainsi l'ingénieur Hans Metsger peut contrôler la fatigue des châssis.
Les châssis pèsent à eux seuls 47 puis 33 kilos, la voiture complète 800 kilos, le moteur V12 de 4,5 litres développe 540 chevaux.
La 917 n'a pas de différentiel, aucun ne supporte la puissance de la voiture, la soufflerie SERA, étudie la 917, cette auto à l'aérodynamisme la plus travaillée "que l'on ait fait jusqu'à ce jour" y compris la F1
Mais comment et pourquoi en arrivé là ?
En 1967, les responsables de l'ACO pressent la CSI (fédération internationale) pour que soit étudié un nouveau règlement pour le championnat du monde des marques, en effet les vitesses moyennes inquiètes.
La cylindrée des "protos" va passer de 3 000 à 5 000 cm³ (pour que les constructeurs américains restent en Europe) pour une production de 50 châssis.
Cette décision est prise en une vitesse record et sans que les constructeurs soient interrogés. Ils sont furieux.
Si Porsche est satisfait, Ferrari est en colère, les Américains trouvent les européens bien compliqués et retournent chez eux
La CSI a peur du manque de participants, elle ramène la production de "protos" à 25 exemplaires pour être homologué en catégorie sport.
La CSI oublie simplement de préciser que les moteurs de 5 litres devront être dérivés de la série.
Porsche fort du soutien de Volkswagen relève le défi pour la conception de 25 châssis !
Une Porsche 908, délivrant 560 chevaux, surclasse déjà ses adversaires.
Le châssis pèse à lui seul 47 kg, la carrosserie en résine synthétique sur une épaisseur de 1,2 mm est renforcé de fibre de verre, elle ne pèse que 95 kg, le moteur (V12) est logé le plus au centre possible…
Quelques mois plus tard, c'est bien 25 châssis de Porsche 917 qui sont exposés aux inspecteurs de la CSI, les voitures sont homologuées "sport" le 1er mai 1969.
230 km/h de moyenne sur un tour au Mans, une vitesse de pointe enregistrée à 340 km/h dans les Hunaudières.
Si la 917 est rapide, c'est une débauche de puissance, d'une grande brutalité, la voiture devient "pointue" à piloter, instable en ligne droite, elle est encore "approximative" dans les courbes rapides et peu précise dans les "sérés".
La voiture est terrifiante à piloter et seul Rolf Stommelen (jeune et téméraire) qui a un aussi sale caractère que sa monture aime piloter cet engin.
Jh Wyer étudie les 917, les anglais conçoivent un court capot, toutes les 917 officielles en seront munies.
11 victoires pour l'équipe Gulf, 2 pour la Porsche Martini racing et 1 victoire pour la Porsche "Piech", sur 14 courses.
La saison suivante (1970), Ferrari décide de se battre contre les Porsche, les Ferrari 512 sont lourdes, elles s'essoufflent et ne peuvent rien contre les monstres allemands.
La CSI impose de nouvelles règles et fait disparaitre les "5 litres" en 1972 la cylindrée reviendra à 3 litres, aucun constructeur ne souhaite courir une année avec 25 voitures neuves sachant que pour 1973 le règlement risque de changer encore.
Les rois de la 917 que sont Jo Siffert et Pédro Rodriguez, ils disparaitront avec les 917, l'un dans une course F1 hors championnat, l'autre dans une course Intersérie sur une… Ferrari 512.
Les 917 détiennent le record de distance aux 24 heures 1971 et la vitesse record de 397 km/h dans les Hunaudières.
Le changement de règlementation entraine le retrait de Ferrari pour la seule F1, l'arrivée de Matra et des années sombres dont l'endurance ne sait jamais vraiment remise, mais a-t-on fait ce qu'il fallait, j'en doute !
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La 917 était une voiture ingénieuse, et ses concepteurs voulaient qu’elle aille très vite en ligne droite, telle une flèche. D’où l’idée de ses flaps qui pouvaient bouger mécaniquement selon le comportement de la voiture.
Mais, quand l’ACO a vu nos chronos aux essais, les organisateurs ont voulu interdire nos ailerons. Porsche a joué la carte du retrait de l’épreuve, arguant que sa voiture avait été pensée avec ces ailerons et qu’elle serait inconduisible avec des ailerons fixes.
C’était de la foutaise évidemment, mais l’ACO a voulu qu’on le prouve. Alors Porsche nous a envoyés, Rolf Stommelen et moi, faire quelques tours en piste avec la consigne de conduire le plus mal possible. On a fait un fantastique show pour faire croire que la voiture était dégueulasse. Notre subterfuge a fonctionné : l’ACO a dit : « Ok, vous conservez les ailerons mobiles sur la 917, vous les rendez fixes sur la 908 ». Nous étions contents de notre coup !
Les ailerons fonctionnaient avec la suspension : lorsqu’une roue arrière compressait la suspension, cela aplatissait l’aileron, car nous estimions qu’il y avait de la charge et donc du grip. Lorsque c’était l’inverse, donc la suspension détendue, l’aileron se braquait pour compenser le délestage. En ligne droite, la pression de l’air à 300 km/h écrasait la voiture sur ses suspensions et débraquait ainsi les ailerons. C’était totalement mécanique et avec des limites. Dans les virages, la roue intérieure braquait l’aileron, celle extérieure le débraquait. Ça bougeait en permanence…
L’autre grande supercherie de Porsche a été l’homologation de la voiture, lorsqu’il a fallu produire les 25 exemplaires obligatoires. La photo, avec tous ces châssis à la chaîne, est mythique !
Ce n’était pas vraiment la chaîne. Il faut se remettre dans le contexte : les voitures allaient de plus en plus vite dans les années 1960, aussi la FIA avait décidé de limiter la cylindrée à 3.0 litres et de créer une nouvelle catégorie, dite Sport, de prototypes 5.0 litres disponibles à l’achat par des clients. Ferrari et Porsche se livraient une bataille folle, mais personne ne voulait fabriquer les 50 exemplaires initialement prévus. Le chiffre a été ramené à 25 voitures, mais c’était encore énorme ! Pour faire cette fameuse photo, nous avions donc aligné ce que l’on appelait les « voitures de secrétaires », parce que l’usine Porsche était si petite à l’époque que toutes celles et ceux qui pouvaient donner un petit coup de main pour fabriquer les voitures dans les temps étaient les bienvenus. Y compris les secrétaires. Lorsque l’inspecteur de là FIA est venu, Ferdinand Piëch a faussement joué la carte de la transparence : « Tenez, regardez chaque voiture dans le détail, prenez les outils que vous voulez ! ». Et, le gars de là FIA a répondu « non, non, je vous fais confiance ! ». Alors que dans les faits, pas une seule 917 n’était en état de marche. Une fois l’inspecteur reparti, les vingt-cinq 917 ont été intégralement démontées et reconstruites proprement, comme de vraies voitures de course.
(Vic Elford)
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